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Couvre-feu : «Les voisins ont souvent un rôle clé pour signaler les cas de maltraitance d’enfants»: Interview de Joanny Moulin, président de l’association Parole d’enfant, par Kadiatou Sakho, journaliste pour Libération

Avec le couvre-feu avancé à 18 heures, les acteurs de la protection de l’enfance redoutent une recrudescence des maltraitances envers les enfants. Joanny Moulin, avocat au barreau de Marseille et président de l’association Parole d’enfant, appelle à la vigilance collective.

L’annonce du couvre-feu généralisé à 18 heures, dès ce samedi, ne laisse pas les acteurs de la protection de l’aide à l’enfance indifférents. Environ 80% des violences faites aux enfants sont commises dans l’environnement familial. Cette mesure fait craindre une nouvelle hausse des maltraitances envers les enfants, analyse Joanny Moulin, avocat au barreau de Marseille et président de l’association Parole d’enfant. 

Le couvre-feu avancé à 18 heures entraînera-t-il automatiquement une recrudescence de la maltraitance infantile?  

Je pense que ce sera le cas. Les bourreaux passeront plus de temps avec leurs victimes, en l’occurrence des enfants. Ces derniers auront beaucoup moins de contacts avec l’extérieur. Par conséquent, ils auront plus de difficultés à dénoncer les violences morales ou physiques qu’ils subissent. Les témoins seront plus rares. Dans cette situation-là, les voisins peuvent souvent avoir un rôle clé pour signaler les cas de maltraitance. C’est un constat que l’on a observé notamment durant le premier confinement.  

Quelles sont les violences qui sont les plus susceptibles d’augmenter ? 

Toutes les formes de violence augmenteront sûrement. Au sein de l’association Parole d’enfant, nous sommes souvent sollicités pour des coups reçus ou des agressions sexuelles intra-familiales. Il arrive aussi que des mineurs soient les agresseurs. Les personnes qui nous appellent ont du mal à contacter directement les pouvoirs publics. Nous apportons aux victimes, une aide psychologique et juridique en se portant partie civile. 

Comment lutter efficacement pour tenter d’éviter ce phénomène? 

Il faut attirer l’attention de la population sur la situation, et en particulier celle des professionnels qui ont un lien direct avec les enfants : les enseignants, les médecins, les éducateurs, les animateurs…  Ces acteurs doivent être formés, afin de pouvoir repérer les signes qui ne trompent pas : bleus récurrents sur le corps, changement d’attitude soudaine, etc. Rappeler aux enfants leurs droits et leurs devoirs est tout aussi important.  Il est essentiel de leur expliquer que leur corps leur appartient, pour les encourager à dénoncer les actes dont ils ont été victimes. Pour eux, il est souvent difficile de le faire surtout lorsqu’un membre de leur famille est impliqué. 

Est-ce que cette mesure impactera le travail de votre association, Parole d’enfant ? 

Nos missions ne s’arrêteront pas à 18 heures. Nous serons disponibles à tout moment. Ceci contrairement au premier confinement où nos missions d’interventions ont été un peu réduites. Les enfants étaient confinés en structure d’accueil sans pouvoir rendre visite à leur famille, ou ils devaient rester à leur domicile et bénéficiaient d’un accompagnement moins intensif et régulier des acteurs de la protection de l’enfance. 

Par Kadiatou Sakho — 16 janvier 2021

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